La demande de fruits rouges explose
07 octobre 2022
Article paru dans L’Oise Agricole
Lors de sa journée nationale consacrée à la production de petits fruits rouges (framboises, myrtilles, groseilles, cassis et mûres) le 27 septembre dans l’Aisne, le CTIFL (centre technique interprofessionnel des fruits et légumes) a fait le point sur les tendances du marché et les dernières avancées techniques autour de 300 professionnels.
Photo, de gauche à droite : Xavier Martin, président de la SAS Lagache, Laurent Derflinger, responsable des achats pour Lidl France, Franck Figuet, président de l’association pour la valorisation de la framboise française, Stéphane Decourcelle, directeur de l’activité frais chez Fruits Rouges et Co, Mathilde Pereira, acheteur chez Prosol, Grégory Renaud, développeur variétal chez Earth Market. – © G.T
Le marché des petits fruits, principalement les framboises et les myrtilles en tête des ventes, connaît une dynamique favorable en forte expansion. L’évolution de la consommation pour la framboise est passée de 5.000 tonnes en 2012 à plus de 20.000 tonnes en 2021. Idem pour la myrtille, avec une hausse de la consommation de 1.000 tonnes en 2012 à 8.000 tonnes par an en 2021 avec une production française toujours autour de 1.000 tonnes. Alors pourquoi la filière française fruits rouges peine-t-elle à fournir les volumes ? Six professionnels ont tenté d’y répondre lors d’une table ronde intitulée « comment développer la production et favoriser l’auto-approvisionnement en petits fruits rouges français ». Tous sont unanimes : il faut augmenter la production française. Ce n’est pourtant pas si facile. Les producteurs doivent faire face à plusieurs contraintes comme le climat, une concurrence étrangère accrue, un manque de main-d’œuvre, une filière à construire et un manque de communication.
S’appuyer sur la recherche
Un manque flagrant de production française oblige aujourd’hui les distributeurs à se fournir à l’étranger pour vendre des fruits toute l’année. « Les produits d’import sont de plus en plus qualitatifs tant en termes de goût que de tenue du produit» a constaté Laurent Derflinger, responsable des achats pour Lidl France. Même si les distributeurs entendent privilégier l’origine France et le local, l’offre n’est pas au rendez-vous. « Il faudrait trouver une variété gustative et spécifique au marché » estime Grégory Renaud, développeur variétal chez Earth Market. Franck Figuet, producteur de framboises en Rhône-Alpes et président de l’association pour la valorisation de la framboise française, avoue que les Espagnols, les Italiens ou les Suisses travaillent de mieux en mieux. A qualité égale, les distributeurs préfèrent se tourner vers l’import souvent plus compétitif. C’est pourquoi, selon les intervenants, il faut trouver une variété avec un potentiel gustatif supérieur, plus de productivité et de robustesse. Les producteurs comptent sur la recherche et l’innovation qui contribuera à améliorer l’offre et à avoir une production plus échelonnée. Pour Grégory Renaud, il faut par ailleurs, regarder vers la robotique et les outils d’aide à la décision pour pallier l’interdiction des molécules de synthèse en France – et pas à l’étranger – et faire baisser les coûts de production. Le désherbage mécanique, par exemple et d’autres techniques sont actuellement à l’essai.
Construire une filière forte
Mais c’est aussi en construisant une filière forte que les producteurs entendent s’imposer. Selon les intervenants, la filière framboise est, aujourd’hui, encore atomisée. Pour Stéphane Decourcelle, directeur de l’activité fruits frais chez Fruits Rouges & Co, « on a tout intérêt à se regrouper pour être force de propositions, absorber les chocs liés à la climatologie ». Des propos appuyés par Xavier Martin, dirigeant de la SAS Lagache, qui a ajouté qu’« un regroupement ne pourrait être que bénéfique pour mieux valoriser les produits et mieux structurer l’offre en contractualisant la production avec des prix minimaux offrant plus de visibilité pour les producteurs et les distributeurs ». Pour cela, il est important de connaître son coût de revient a prévenu Franck Figuet et d’avoir des prix de vente rémunérateurs. « Une revalorisation des produits assurerait le maintien des exploitations en place et encouragerait l’installation de jeunes dans les petits fruits rouges ». Mathilde Pereira, acheteur pour Prosol, est revenue sur l’importance de protéger les cultures. « La filière petits fruits rouges est très impactée par les événements météo. Ces dernières années, on a connu grêle, gel, coup de chaud, pluie, ce qui impacte nos approvisionnements. On s’adapte en fonction des volumes mais il faut se prémunir de ces risques. La solution c’est de pouvoir couvrir ses vergers avec des tunnels, avec des filets ou des panneaux photovoltaïques ».
La communication à tous les niveaux
Amélioration génétique et variétale, création d’une filière forte, contractualisation de la production,… sont des leviers qui ont été proposés par les intervenants. Mais il en reste un et pas des moindres : la communication. Entre professionnels d’abord. « La bonne communication entre l’amont et l’aval facilitera la gestion des à-coups de production et d’anticiper. L’intérêt c’est avoir des producteurs et que ce soit rentable pour tous » a expliqué Laurent Derflinger qui s’approvisionne à 98 % de myrtilles françaises durant la pleine saison.
Grand public ensuite : les petits fruits rouges font partie des achats plaisir. Il faut donc inciter le consommateur à goûter puis acheter et revenir avec des campagnes publicitaires, mais aussi en valorisant le produit directement chez le distributeur. Le vrac ou la mise en armoire réfrigérée pour une meilleure conservation du produit font partie des solutions tout comme l’emplacement dans le magasin. « Il y a 10 ans on consommait en France, 4 g de myrtilles par an et par habitant. Aujourd’hui c’est 100 g. Les Anglais sont à 800 g et les Américains à 1,2 kg. On a de réelles chances de voir la consommation s’élever ».
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